De fin mars à mi-juin 2020, les fronts miniers de la zone nord, dans le 11e horizon de la mine de Trepca Stan Terg, à 745 m sous la surface, ont traversé une zone extraordinairement riche en bournonite, avec des cristaux très pointus en forme de roue dentée (macles cycliques) de bonne taille. L’espèce avait été signalée pour la première fois dans ce gisement historique des Balkans en 1937 (1), sept ans seulement après le début des activités minières modernes. La bournonite a donc été présente en permanence à Trepca, bien que toujours de manière modeste et éparse : récemment, entre 2014 et 2016, plusieurs spécimens, parmi les plus significatifs à ce jour, ont été découverts, présentant des cristaux de 0,5 à 1 cm fixés sur de la pyrite. L’année dernière, en 2019, de petits cristaux de bournonite ont été découverts, pour la plupart petits et très mats, associés à des aiguilles allongées d’arsénopyrite. Au cours des derniers mois, plusieurs types de spécimens ont été découverts, presque tous nettoyés à l’acide chlorhydrique dilué pour éliminer la couche de carbonate recouvrant les sulfures. La découverte, début mars-début avril, s’est distinguée par d’étonnantes combinaisons de cristaux de bournonite de 1 à 2,5 cm, disposés de manière très aérée sur les extrémités de larges lames de pyrite pseudomorphosées en pyrrhotite. La découverte s’est poursuivie en mai-juin avec des spécimens présentant une architecture plus « classique », sous forme de plaques atteignant parfois de grandes dimensions (25-30 cm) et portant des cristaux de bournonite pluricentimétriques, atteignant rarement 5-6 cm de long. La plupart des spécimens présentent des cristaux ternis, oxydés lors du processus d’attaque à l’acide, présentant ensuite un aspect noirci ou alvéolé. Cependant, dans le meilleur des cas, les cristaux, qui présentaient probablement initialement un état de surface particulièrement bon, ont fini par présenter un brillant parfait, avec une très belle couleur grise et un éclat métallique. Quelques spécimens présentent une couche de microcristaux de sulfure déposée par gravité, dont la nature chimique reste à déterminer. Cette découverte place désormais Trepca Stan Trg parmi les meilleurs sites européens pour cette espèce, parmi la mine Herodsfoot en Cornouailles (Royaume-Uni), les gisements du district d’Altenkirchen et du Harz (Neudorf) en Allemagne, Pribram en République tchèque et Baia Sprie en Roumanie. En France, citons notamment les mines alpines de La Mure et du Mésage dans les Alpes, les mines de Pontgibaud et des Malines dans le Massif central et Saint-Pons dans les Alpes du Sud-Est.

(1) Gagarin, G. et Pavlović, S. 1937, Bournonite de la mine de Trepca, Yougoslavie. Registre géologique de la péninsule balkanique.

Lucas ETIENNE

Trepca : un gisement métallique surprenant…
La ceinture métallogénique de Trepca englobe plusieurs gisements de Pb-Zn-Ag et une quarantaine de mines, dont sept sont actuellement en exploitation. Stan Terg est de loin le gisement le plus important, tant du point de vue économique que minéralogique : la grande majorité des spécimens de la collection proviennent de la mine éponyme. La formation du gisement est liée à un événement magmatique alpin tardif, mis en évidence par l’intrusion, durant l’Oligocène-Miocène, de plutons de granodiorite et de pipes d’andésite dans des roches métasédimentaires de faible teneur. Les corps minéralisés de Stan Trg remplacent des roches métacarbonatées et se développent le long d’une pipe phréatomagmatique de 100 à 200 m de diamètre, érodée en surface et à l’échelle kilométrique en aval-pendage. Les roches calcaires encaissantes ne sont pas toujours métasomatisées et la minéralisation sulfurée peut être associée, ou non, à des skarns calciques.